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A Cuba, Che Fidel
26 juin 2015

A Santa Clara, touche pas à mon touriste

La journée a commencé relativement tôt. A 8 heures je prends un bateau pour la forteresse de la Jagua, à l’entrée de la très grande baie de Cienfuegos. A ma grande surprise, il y a du monde, et aucun touriste étranger. Parmi les gens qui se sont sagement mis en file indienne pour accéder à l’embarcation, des Cubains qui vont chercher du poisson et d’autres en vacances. Il y a évidemment plus de personnes que de sièges disponibles. Tous les genres sont représentés : l'un porte un tee-shirt estampillé FBI, le sous-titre précisant que c’est Fabulous Body Inside ! Un jeune homme en bleu de travail écoute de la musique et envoie des baisers à sa fiancée. Une jeune femme donne le sein à sa fille qui doit bien avoir 2 ans sous l’œil inerte d’un travailleur de bureau, mallette en bandoulière, qui doit cuire dans ses mocassins et chaussettes.

Cienfuegos, pêcheurs.

Le bateau fait plusieurs arrêts. Des gens montent et descendent. Les vélos sont parfois du voyage. Les villages qui bordent la baie sont pour la plupart dédiés à la pêche. En cette heure matinale, les pêcheurs trient leur « récolte » du jour les pieds dans l’eau devant leur maison. Une heure plus tard, nous arrivons à la forteresse de Jagua, édifiée avant l’arrivée des Espagnols pour repousser les pirates intéressés par Cienfuegos.

Cienfuegos, forteresse de Jagua.

Cienfuegos, vue sur l'entrée de la baie depuis la forteresse de Jagua.

Quelques maisons, une petite église, trois commerces dont les enseignes ne sont que des mots peints à côté de l’entrée. La forteresse a été bien restaurée. Elle offre une belle vue sur la baie et les quelques salles à visiter sont remplies d’objets épars. Ca va d’une chemise de capitaine au plan de la centrale nucléaire inachevée toute proche en passant par des bouteilles en céramique ou des instruments de navigation.

Cienfuegos, vendeur de légumes à la halle.

Un couple m’aborde et me vante les délices de son restaurant. Il est 9h30 et leur fais remarquer que ce n’est pas vraiment l’heure de manger. Ce qui permet de poursuivre la conversation sur la bonne qualité de vie de cet endroit où l’air est pur, sur les difficultés de vivre à Cuba, les cousins aux Etats- Unis, les mérites de la plage Santa Lucia par rapport à Cayo Coco, trop touristique… Et l’homme finit par me demander un stylo pour son fils qui est à l’université. Prévoyante après la journée d’hier, j’ai ce qu’il faut dans ma poche ! Un petit rien qui fait un grand plaisir. La halle du coin est miséreuse. Deux commerçants attendent le client à l’intérieur : un étalage fourre-tout et l’autre où je cherche vainement sa spécialité, ne voyant rien à vendre. A l’entrée, un homme propose du poisson et un vieux paysan a étalé divers légumes un peu plus que fanés.

Avant de reprendre le bateau, je discute avec Luciano. Il est venu acheter du poisson car c’est moins cher. Et il est loin d’être le seul. Il me raconte que sa sœur vit à Bayonne depuis une vingtaine d’années mais qu’il n’a pas eu de nouvelles depuis longtemps. A force d’échanges, il me demande si je peux contacter sa sœur et lui donner son numéro de portable qu’elle n’a pas. Mais il n’a pas ses coordonnées, doit appeler sa mère, ne connaît pas même le nom de son beau-frère. Finalement, je récupère son numéro de portable et promet de l’appeler plus tard pour que je note le contact et appelle une fois en France.

Cienfuegos, femme se protégeant du soleil dans la rue piétonnière.

De retour à Cienfuegos, un passage par la rue piétonne s’impose tant elle est animée. Les parapluies protecteurs du soleil sont de sortie, pour les hommes comme pour les femmes. Je vois plusieurs personnes avec un ventilateur sous le bras. Dans un magasin d’alimentation, il y a rupture de café, au grand désespoir de personnes venues en acheter. Pour un jeudi en fin de matinée, il y a beaucoup de monde : de jeunes couples avec un bébé seulement vêtu d’une couche et porté à bout de bras (les poussettes restent rares), des jeunes femmes aux formes arrondies, smartphone à la main, cigarette aux lèvres, déambulant peut-être pour se montrer, de vieilles personnes voûtées, deux fillettes buvant une boisson rafraîchissante sur un banc… la vie normale d’une rue parisienne commerçante. aucun indice de la moindre difficulté économique. Tout le monde a l’air heureux.

Cienfuegos, rue commerçante piétonière.

C’est l’heure maintenant de m’occuper de mon transport vers Santa Clara. Puisqu'il n’y a qu’un bus à 16h30, je me mets en quête d’une voiture. Il faut passer par les rabatteurs qui font des ronds autour de la gare routière. Je me mets d’accord avec deux d’entre eux. Ils me promettent un siège à l’avant d’une grosse voiture américaine et personne à côté de moi sauf le chauffeur, bien entendu. Ils doivent passer me prendre à ma casa particular. Bizarrement, ils mettent du temps… et quand ils arrivent, il y a deux personnes assises à l’avant, la seule place restante est à l’arrière, serrée contre trois autres personnes. Je dis non, aidée par le propriétaire de la casa, Elias, qui se charge de me trouver un autre véhicule. Cinq minutes plus tard, une belle américaine bleue à l’extérieur, rouge à l’intérieur, se gare. Ils sont quatre à l’arrière, je m’installe seule à l’avant. La voiture a tout juste démarré que les deux rabatteurs s’en prennent à Elias qui leur a cassé le marché. La discussion semble rude. C’est que le touriste est fort prisé. Et quand on en tient un, on n’a pas envie de le partager. Ce que je constaterai plus tard.

De Cienfuegos à Santa Clara, dans une automobile d'un autre temps.

La voiture tremble d’un peu partout, la boîte d’embrayage grince et à deux reprises, la porte arrière s’ouvre à pleine allure. La jeune fille un peu trop épaisse pour son âge a bien failli tomber sur la chaussée ! Quelle idée aussi de frôler la manivelle ! Le pare-brise est fêlé à plusieurs endroits. Sur la route jusqu’à Santa Clara, un panneau avec le célèbre « Nadie se rendira, lo juramos » et bien d’autres slogans qui font partie du paysage mais que seul un œil neuf doit voir tout en s’étonnant. Nous croisons un scooter qui en traîne un autre, les champs de canne à sucre rythment les kilomètres… très approximatifs. Un panneau peut indiquer 42km, mais 10 km plut tôt un autre donnait 38 avant Santa Clara. Un champ de panneaux solaires apporte la démonstration que ce pays est capable d’un peu de modernité. Nous traversons plusieurs fois une voie ferrée. Chaque conducteur doit s’avancer avec précaution, même si en une semaine, je n’ai vu aucun train rouler. Le chauffeur use de son klaxon avec modération et c’est bien dommage parce que sa rondeur est parfaitement accordée avec le tempo du quotidien.

L’arrivé à Santa Clara se fait sans encombre. Le chauffeur m’amène jusqu’à une casa que j’ai choisie, mais où il n’y a pas de place disponible. La propriétaire appelle son cousin qui vient me chercher. Dans la ville du Che, les rues sont étroites. Une rue piétionnière derrière la place Vidal a été dénommée Boulevard. Quelques magasins aux vitres teintées gardent un mystère sur le contenu des produits à vendre. C’est peut-être préférable. La place Vidal est dominée par l’hôtel Santa Clara Libre où Fidel Castro… et Jean-Paul Sartre ont séjourné. Un peu à l’écart le glacier Coppelia est fermé alors qu'il est censé être ouvert jusqu'à 23 heures.

Santa Clara, rue piétonnière rebaptisée boulevard.

Santa Clara, pharmacie.

Après un petit tour de la ville à pied, qui n’a finalement pas grand intérêt, je décide de prendre le bici-taxi vers la place de la Révolution. Et c’est là que ma condition de touriste fait de moi un objet très convoité. Une femme, qui m’avait abordée précédemment pour me vanter la bonne qualité de la cuisine du restaurant Cuba, voit très mauvais œil le charme que me fait un rabatteur de bici-taxis. Elle s’en prend à lui assez violemment, lui dit qu’il interfère dans ses « affaires » et tente de me convaincre de ne pas le suivre. Je lui réponds qu’il n’est de toute façon pas l’heure de manger (décidément) et que je fais ce que j’ai envie. Elle nous suit, le dénonce comme rabatteur. Ce à quoi je lui réponds qu’elle ne fait pas autre chose pour le restaurant. Très, très fâchée la dame, dont le regard enjoliveur et la voix doucereuse ne me plaisaient pas. Il faudra juste l’éviter un peu plus tard… quand il sera l’heure de dîner.

Santa Clara, une plaque de rue très inhabituelle.

Dans son tee-shirt Sony, le « chauffeur » du bici-taxi a l’allure d’un joueur de football. Mais son corps chétif, ses chaussettes trouées au talon et ses poches de pantalon décousues révèlent la dure condition de son travail. Nous faisons un arrêt par la gare routière, où je ne peux que réserver une place pour le lendemain en direction de Trinidad. Comme imaginée, la place de la Révolution est une immense esplanade vide.

Santa Clara, place de la révolution.

Santa Clara, monument dédié au Che, place de la Révolution.

Un monument est dédié au Che, avec une statue du guerillero haute de 7 mètres. Le musée qui se trouve en-dessous est fermé. Je ne vais pas pleurer. Surtout que les photos n’y sont pas autorisées. La soirée se termine au restaurant… Casona Guevara, restaurant privé créé par une véritable aficionada du Che. Tant qu’à passer dans cette ville, autant marcher sur les traces du beau gosse dont le portrait est devenu un emblème national.

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  • Premier voyage à Cuba, avant que les relations de l'île avec les Etats-Unis ne soient totalement réchauffées. Merci Barack Obama de cette décision qui m'a fait changer de destination de vacances.
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