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A Cuba, Che Fidel
25 juin 2015

Cienfuegos, un charme très provincial

Le bus de Transtour qui m’emmène à Cienfuegos passe par l’hôtel Los Jazmines, le seul véritable hôtel de Viñales. Il dispose d’une piscine, un vrai luxe. Et bien sûr, les chambres donnent sur la vallée des mogotes. Mieux vaut disposer d’une voiture pour y séjourner toutefois. C’est parti pour environ 7 heures de route. Une partie sera la même qu’à l’aller puisque l’autoroute passe par La Havane, mais nous contournerons la capitale. Les mêmes scènes se répètent. Mais cette fois ce sont des autostoppeurs étrangers que nous prenons en charge ! L’argent de leur ticket ne va peut-être pas dans les caisses de la compagnie de bus… Comme à l’aller, nous ne verrons que de rares camions de marchandises.

Ce qui frappe peut-être plus encore, ce sont tous ces champs qui ne sont pas cultivés. Quand on sait que Cuba importe une grande partie de la nourriture, c’est difficilement compréhensible. Le résultat d’une politique sucrière qui s’est effondrée le jour où le grand ami soviétique a décidé d’arrêter de soutenir les cours du sucre. Par endroits, il y a de très grandes étendues d’arbres fruitiers et au fur et à mesure que nous approchons de Cienfuegos, les champs de canne à sucre sont plus nombreux. Quelques plantations aussi d’ananas. Et de gigantesques panneaux célébrant l’un l’amitié de Fidel avec feu le Vénézuelien Chavez, l’autre le peuple cubain, celui des travailleurs sans lesquels rien ne s’est fait ou encore l’éternel « hasta la victoria siempre » accompagné du visage du Che. En revanche, pas un seul panneau publicitaire. Même au cœur de la Birmanie en 2003, les biens de consommation s’affichaient en ville et à la campagne. Ici, rien. Nulle part. Quel repos pour le regard ! Mais cette absence en dit long sur la disponibilité des produits dans l’île.

Cienfuegos, glamour boutique.


Nous faisons un arrêt dans une finca aux allures très révolutionnaires pour déjeuner, où une pauvre vieille iguane tourne en rond dans son petit enclos, comme les poules dans le leur, les canards et les lapins. L’ensemble, dont les objectifs didactiques sont clairs, est entouré de plusieurs bars et magasins de souvenirs. Un groupe joue de la musique pendant le déjeuner mais nous épargne le sempiternel – et pourtant si entraînant – Guantanamera. Nous arrivons à Cienfuegos vers 13 h30. Quelques personnes, mais peu, proposent une chambre. Je me dirige vers celle que j’ai choisie en fonction des commentaires du guide. Et elle est à la hauteur. Une vraie maison coloniale très haute de plafond avec une enfilade de plusieurs chambres et agréablement aménagée. Les propriétaires sont charmants. Lui apprend le français avec Assimil, mais se verrait bien partir six mois à la Martinique pour le maîtriser vraiment pendant que sa femme continuerait de faire tourner leur affaire. Comme dans toutes les casas particulares, le dîner est proposé. Et il y a même une carte ! Il faut décider de son menu à l’avance.

Cienfuegos, cathédrale de la Purisma Concepcion.


Le centre de Cienfuegos, ville fondée par les Français, n’est pas très grand. Mais il déborde d’énergie. Quelle stupéfaction de voir autant de magasins ! Il n’y en avait pas autant là où je me suis promenée à La Havane. Les voitures aussi sont plus nombreuses, les neuves. Les vieilles Américaines sont moins visibles. Plus de scooters, y compris électriques, mais également des carrioles à cheval en assez grande quantité. Elles servent de taxi. L’essentiel de ce qui est à voir se concentre autour de la place José Marti. La cathédrale de la Purisma Concepcion arbore normalement des vitraux français, mais ils ont été démontés et envoyés en restauration en Espagne. Au moment où j’y entre, un homme en sort, me demande d’où je viens et me réclame un stylo. C’est la première fois depuis le début du séjour. Je sors celui qui est dans ma poche et le lui donne. La même scène se reproduira une autre fois avec un jeune garçon, mais celui-ci réclamera aussi une boisson fraîche et de façon insistante. Et enfin, un homme tendra la main pour un peso afin de manger, mais il n’a rien d'un mendiant qui traîne dans les rues de La Havane. Il guette sans nul doute le touriste, alors que les vieux dépenaillés faisant la manche dans les rues de la Habana vieja ne sont que misère tout en étant partie intégrantee du décor.

Cienfuegos, siège du gouvernement régional.


Tous les bâtiments qui entourent la place ont été rénovés. Le siège du gouvernement, comme le Musée provincial ou le Teatro Tomas Terry, copie d’un théâtre milanais, splendide avec ses sièges en bois et ses balcons ajourés. Un groupe de Français écoute religieusement leur guide qui raconte que s’il y a si peu de champs cultivés c’est que les gens ne veulent pas travailler à la campagne. Je suis rassurée d’entendre certains douter de ses affirmations. Le palacio Ferrer, tout de bleu pastel, abrite un centre culturel. Quelques peintures, dont certaines très inspirées d’Andy Warhol, sont accrochées dans l’entrée. Le reste consiste en plusieurs salles où sont donnés des cours. Sur un panneau d’information, une pancarte invite fermement les parents à ne pas rester pour assister aux cours auxquels participent leurs enfants. Universalité des comportements…

Cienfuegos, enfilades de colonnes.

Cienfuegos, magasin "moderne" dans le centre.

Cienfuegos, vente ambulante dans la rue.


Dans une rue adjacente, des vendeurs de souvenirs, les mêmes que vus précédemment, attendent le client avec nonchalance. Il fait toujours aussi chaud, si ce n’est plus chaud. Nous devons dépasser les 35°C. Une longue rue piétonnière dégage un dynamisme que je n’ai pas constaté jusqu’à présent. La mode française est à l’honneur, une Glamour boutique reste un peu mystérieuse, les petites échoppes sont légion et les cabines téléphoniques sont à portée de toutes les envies de téléphoner. On y vend aussi des vêtements pour homme, de l’ameublement, mais comme ailleurs les magasins d’alimentation dégagent un sentiment de pénurie. D’ailleurs, un client repart sans café : il n’y en a plus.

Cienfuegos, attente tranquille dans la rue.


L’explication viendra plus tard. Grâce à une discussion approfondie avec les propriétaires de la casa particular, j’apprends que Cienfuegos est la ville où l’on vit le mieux à Cuba parce qu’il y a du travail : une usine pétrochimique, une raffinerie, un port et qu’en plus la vie culturelle y est riche. Lui était ingénieur civil et sa femme travaillait comme conservateur au musée provincial avant qu’ils ne décident d’échanger avec un couple âgé cette maison coloniale fort détériorée contre la maison moderne qu’ils avaient construite et de la remettre en état pour en faire une casa particular. Pari réussi. La maison a beaucoup de charme et eux aussi. Si Cienfuegos n’était pas aussi restreinte en terme de visites, il ferait bon y rester un peu plus longtemps rien que pour eux.

Cienfuegos, le palais bleu à la Punta Gorda.


L’autre morceau intéressant à voir ici, c’est la Punta Gorda. Après avoir descendu le Prado qui se transforme en Malecon, nous arrivons à une pointe qui plonge dans la mer. Elle est bordée de belles maisons qui datent d’avant la révolution. Le Palais bleu, comme d’autres, était un casino géré par la mafia et est aujourd’hui devenu un hôtel d’Etat. Plusieurs maisons sont à double étage, ce qui reste rare. Beaucoup étaient des villas secondaires. Il y a du style français, mais certaines font vraiment penser à la structure des maisons américaines. Quelques-unes ont été récupérées par le gouvernement, d’autres sont privées. La plus étonnante ressemble à un petit palace où tous les genres architecturaux ont eu leur place. A la fois gohtique, mauresque et vénitien, le Palais del Valle dispose de trois tours, toutes différentes. J’ai pris un bici-taxi pour venir jusque-là. Il se fait un plaisir de me décrypter l’enfilade des maisons. Au bout de la pointe, un petit parc où des Cubains en vacances boivent à la buvette, se baignent habillés, font du pédalo ou bronzent sur des bouts de sable.

Cienfuegos, palais del Valle à la Punta Gorda.


Avant de rentrer dîner à ma casa particular, je fais un tour au point Internet de la ville. J’y suis très mal accueillie par une employée qui a perdu sa langue. Très inhabituel. Pas de wi-fi, une connexion assez lente qui ne permet pas d’écrire de longs messages ni de poster les écrits pour le blog. Espérons que ce sera mieux à Trinidad. Le dîner de crevettes est délicieux et la discussion avec les hôtes enrichissante. Leur fille a émigré au Mexique et le fait d’avoir une petite-fille mexicaine permet à Dagmara, qui tient son prénom d'un roman allemand que sa mère lisait quand elle était enceinte, de disposer d’un visa permanent. Son mari n’a pas le même problème car il a un passeport espagnol. En théorie, il peut voyager où il veut. En pratique, il faut un peu d’argent.

Cienfuegos, un taxi comme un autre à Cuba.

Pourtant, ce couple appartient à une catégorie de population déjà un peu plus aisée. Une fois par an, ils rendent visite à leur fille à Mexico. Ils n’ont pas de voiture, mais un scooter électrique venu du Panama ou de l’Equateur. Quatre frigos sont répartis dans la maison, décorée avec goût même si on peut ne pas aimer le mobilier en bois foncé un peu massif. Dans le salon de l’entrée, un grand écran plat de télévision et un ordinateur où Elias reçoit son courrier électronique. En revanche, la seule lecture disponible est le Granma, quotidien très peu objectif et encore moins informatif. Pas un seul livre. Ce qui ne manque pas de surprendre pour un couple relativement cultivé et éclairé sur la situation de leur pays.

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A Cuba, Che Fidel
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  • Premier voyage à Cuba, avant que les relations de l'île avec les Etats-Unis ne soient totalement réchauffées. Merci Barack Obama de cette décision qui m'a fait changer de destination de vacances.
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